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Une clinique continuiste

Que reste-t-il du modèle princeps de la névrose de Freud ? La névrose tendrait-elle à disparaître à cause du changement de nos sociétés ? De la relativisation des interdits ? De l’absence des références paternelles ? Ou est-ce les fondements de la névrose même qui sont remis en questions ? Peut-on  alors parler d’une clinique continuiste ?

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Cyprien Godebski : Portrait

De nos jours, les modalités de nouage non œdipien concernent beaucoup d’adolescents et nombre des patients des psychanalystes… Peu de manifestation de l’inconscient, pas d’intérêt pour leur fonctionnement psychique, peu d’engagement d’une façon générale, en particulier dans les relations de couple, pas de culpabilité, mais en revanche un fort narcissisme et un exercice de la jouissance pulsionnelle cherchant la satisfaction immédiate… Jouissance de « L’Un » débridée, multiple et hors castration.

Ces sujets, pour qui l’Autre n’existe pas, sont-ils pour autant hors discours, au sens des quatre discours lacaniens (du maître, de l’hystérique, de l’analyste et de l’universitaire) qui structurent le lien social ? Ils sont dans un discours où le Maître n’est plus aux commandes, mais le sujet lui-même avec sa liberté de jouissance. « Tout est permis du moment que cela produit du plus-de-jouir, de la jouissance à bon compte » (J.-A. Miller, 1990).

A la place d’un signifiant maître, le sujet est dans une liberté de jouir sans tenir compte de l’Autre. Il entretient le culte de son moi et se satisfait des plus-de-jouir sans en passer par la castration. « Conséquence : un nouveau type de malaise dans la civilisation qui ne relève pas du renoncement mais au contraire de la permissivité sans frein de la jouissance » (Deffieux J.P. 2007).

Aujourd’hui nous devons trouver de nouvelles façons de nommer les choses. La question n’est plus de savoir à quelle structure appartient un sujet, mais quelle modalité de sinthome est envisageable. Au regard d’un réel hors sens, toute interprétation, construction, aussi approximative qu’elle puisse être, peut fonctionner comme suppléance, comme principe d’ordonnancement d’une existence.

Le passage d’une clinique binaire, névrose/ psychose, à une clinique continuiste implique plus que la pluralisation des Noms-de-Pères. La première clinique pointe un déficit du signifiant qui manque dans les psychoses. C’est par un artifice du discours (le Nom-du-Père) que la névrose permet de pallier le déficit du symbolique. Dans la deuxième clinique, c’est le symbolique comme tel qui est déficient. Le Nom-du-Père aussi apparaît comme une suppléance. Et d’autres nouages peuvent fonctionner que les semblants du père.

La généralisation de la fonction de symptôme donne la possibilité d’accompagner des sujets orientés par d’autres critères que la présence/absence du Nom-du-Père. Il ne s’agit pas d’abolir les différences cliniques, mais de les relativiser, de ne plus les opposer. L’arrangement «non œdipien» n’est plus situé comme défaut de névrose, mais comme une manière de s’arranger, entre autres, avec la faille sous-jacente à tout arrangement. Les différences structurales sont relativisées au profit du sinthome, nom générique de ce qui peut fonctionner comme orientation, arrimage, boussole…

Ce tournant entraîne des changements dans la théorie comme dans la clinique : « La distinction se fait par une topologie des modes de jouir » (Miller J.-A. 2009). Ou il y a un condensateur de jouissance bordé par la castration, ou il y a débordement, et le mode de jouissance est déplacé, aléatoire, souvent excessif.

Ce nouvel enseignement de Lacan ouvre les portes de la modernité aux analystes. Ils ne sont plus condamnés à être les défenseurs réactionnaires de la famille traditionnelle et à militer pour le Nom-du-Père et l’autorité. Du moment où l’on fait la différence entre fonction paternelle ou maternelle, et position sexuée des sujets, on peut admettre toutes nouvelle formes de parentalité… Envisager que deux hommes, liés par un lien homosexuel, élèvent un enfant et s’occupent parfaitement de lui. Ou deux femmes. Si les fonctions sont maintenues, c’est-à-dire s’il y a une fonction de nom et une fonction de soin, il y a un cadre. Et il serait malvenu de la part des analystes qui recueillent les boiteries du système patriarcal œdipien, de le considérer comme un paradis perdu.

(Extrait de « Le tout dernier enseignement de Lacan »
J. Godebski, L’Harmattan 2015)

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« Le tout dernier enseignement de Lacan »

Des vidéos prises sur le vif des ateliers et conférences sont disponibles sur la chaîne :  Jean Godebski – You Tube

Jean Godebski

Psychanalyste Psychothérapeute - Cabinet Jean Godebski (Nimes) Cabinet Jean Godebski Psychothérapie

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